DE SEL ET DE CENDRE
Réédition
Parution en mai 2022, 20 € (hors envoi) et disponible à l’AAJP
Les éditions La Trace, après celle de deux romans (Histoire de Lou et Montagne aux solitudes) en 2021, poursuivent – grâce aux Amis de Jean Proal – la réédition de l’œuvre de Jean Proal.
NB : Jean Proal, parle de ce roman dans le bref extrait en ouverture de notre site
Présentation
C’est parce qu’il a senti, aimé et compris cette terre de manades, de légendes et de pèlerinages que Jean Proal a écrit ce roman : « Mon premier passage en Camargue m’a donné un coup. Sans l’avoir jamais vue, je l’ai reconnue. J’ai su dès la première minute que ce pays répondait comme la montagne à mon goût profond de la solitude et du silence. J’ai compris que tous les “déserts” se valent et qu’ils façonnent de la même manière, le même visage de l’homme. Montagne et maremme sont deux formes de la même grandeur et de la même peine de vivre. Une race, une civilisation sont d’une et de l’autre part, en train d’y mourir. »
Hélène de Silve vit seule au cœur de la Camargue, sous le regard de Michel, un ami d’enfance qui la désire, et sous la protection équivoque d’un autre homme qui s’occupe de ses troupeaux, Jourdan. Celui-ci étant accusé de meurtre, une enquête débute et voit bientôt l’arrivée d’un inspecteur de police énigmatique. Bouleversé par la beauté et le mystère d’Hélène et de cette Camargue envoûtante, il a tout compris…
Ce roman avait reçu, en 1953, le Grand prix de la Société des Gens de Lettres (SGDL).
Photographie de couverture de Didier Leclerc. Préface de Pierre-Julien Brunet, postface d’Anne-Marie Vidal. Avec un soutien financier conséquent de l’AAJP.
Quatre extraits...
« Nous aimons trop notre pays pour ne pas garder dans nos mémoires quelques vers ou quelques phrases dont la beauté nous émeut à juste titre. Mais les demi-dieux sont morts, et le plus valable des poètes de la Camargue en témoigne : Joseph d’Arbaud, qui a fait disparaître le dernier au plein cœur du Moyen Âge.
Des hommes sont restés sur cette terre inhospitalière, et ils mènent encore aujourd’hui la vie que menaient leurs ancêtres. Mais ils se sont débarrassés des superstitions et des contraintes de l’ignorance et des exigences du seul instinct. Des bergers suivent encore à cheval, sur la même selle que leurs aïeux, des bêtes qu’on ne peut plus dire sauvages depuis qu’ils les nourrissent d’avoine et de paille de riz… » in début de l’ouvrage
«Madame de Silve savait ce que valait son serviteur. Attachée aux traditions les plus nobles et les plus valables de son milieu et de son pays, passionnée de liberté jusqu’à lui sacrifier toutes les occasions qu’elle aurait pu avoir de mener une vie plus facile et plus conforme à son éducation, elle a cru voir dans cet être fruste un de ceux qui témoigneraient avec elle d’une façon de vivre qu’elle croyait noble et qu’elle savait condamnée. Nous ne pouvons que nous incliner devant son erreur et le prix exorbitant dont elle l’a payée. Mais je ne veux pas laisser dire qu’elle était la maîtresse de cette brute. Je ne veux pas qu’un trouble subsiste dans vos esprits sur les relations de cette jeune femme crédule et bonne avec cet homme que nous verrons livré aux plus bas instincts. Je veux que vous soyez débarrassés de ce romantisme de pacotille… »
« Hélène aimait le vent, ce vent qui “compose” la Camargue au même titre que l’eau, le sel et la terre. Chargé d’eau, de sel ou de sable, il matérialise le ciel, le mêle à la plaine et fait reculer leurs limites confondues au-delà de toute mesure humaine.
Le vent était pour Hélène mieux qu’un compagnon, un élément de sa vie. »
« Le même geste, à la même heure. Hier matin, c’est toute la misère du monde – avec le vent, la pluie, le froid – qu’Hélène semblait vouloir exorciser de ses bras tendus pour ouvrir les volets. Aujourd’hui, c’est toute la joie et toute la paix de la terre qu’elle paraît accueillir. Ce mouvement des bras qui livre au soleil levant la chambre de la nuit, c’est aussi un geste qui ouvre le corps et l’âme, les libère et les expose, les lave au souffle d’un monde recommencé.
Pour Hélène, le temps ne compte pas. Elle s’est si bien identifiée à ce pays qui ne vit que de la vie fluide des éléments, ce pays où les mesures humaines n’ont pas de sens, qu’elle vit dans une sorte de présent continu et indistinct. Les souvenirs de son enfance, ceux de sa vie de jeune femme, se mêlent et se confondent. Tout ce qu’elle a fait, tout ce qu’elle est et, peut-être même, tout ce qu’elle a lu, vit en elle de sa vie présente, comme vivent en même temps, suscités par un geste unique, le morne désespoir de la veille et l’exaltation de cette aube. Elle est en même temps l’un et l’autre. »
extraits préface, postface... et journaux
– Préface de Pierre-Julien Brunet
Il convient également de ne pas oublier le rôle joué par sa timidité extrême, pour ne pas dire maladive, dans un milieu littéraire où la concurrence est rude et où les plus discrets sont rarement entendus, et encore moins attendus. Une timidité liée – et peut-être même due – à un profond manque de confiance en soi qui a toujours empêché Jean Proal de se considérer à sa juste valeur d’écrivain comme en témoignent sa correspondance et ses journaux intimes…
Pour autant, quels que soient son sujet, les personnages mis en scène et le lieu de l’action, l’écriture de Jean Proal dégage toujours la même puissance et la même tension qui sont chez lui plus que des marques de fabrique : une véritable identité littéraire. L’auteur de De sel et de cendre fait en effet partie de ces écrivains qui touchent le lecteur au plus profond de leur être, non seulement parce qu’ils ne cessent de creuser les mêmes obsessions, mais aussi parce que ces questions sont des éléments fondamentaux de l’existence humaine, des sortes de “nombres premiers” qui permettent toutes les combinaisons narratives et réflexions possibles.
– Posface d’Anne-Marie Vidal
De Henri Calef « Vous avez écrit un grand bouquin, d’une puissance, d’une maturité, d’une aisance remarquable. Il y a toutes vos qualités d’écrivain mûries par vos qualités d’homme. Il semble que vous vous soyez débarrassé de toutes les adhérences d’un conformisme puritain pour laisser libre cours au flot de votre tempérament. En vous lisant j’avais l’impression d’avoir constamment vos yeux sur moi, tandis que jusqu’ici ce même regard hésitait à se poser avec cette intensité. […]
Je ne pense pas sans émotion à nos rencontres, à nos conversations, à l’échange de nos espoirs. Vous avez trouvé la joie et la paix ; cela crie tout au long de vos pages, cela chante dans votre phrase cela suinte à travers vos mots. Votre style s’est coloré de cette rougeur si émouvante qui enflamme un visage de femme lorsqu’on lui parle d’amour. Les critiques que j’ai lu – toutes élogieuses – semblent percevoir ce changement, cet épanouissement, sans cependant en déceler les éléments réels, les conditions profondes. »
Jean Proal a dû être bouleversé par cette lettre, lui qui écrivait fin mars 1954 à Maurice Bedel : « Je reste si proche de mes livres, que les témoignages d’estime qu’ils reçoivent me touchent comme un message d’amitié ».
– Brèves parues dans la Presse
Le Monde, “il est difficile de résister à un roman qui vous replonge en pleine Camargue, qui réveille le souvenir de ses paysages irréels, de la masse immobile sous le soleil éclatant du Vaccarès” (Robert Coiplet) ;
Les Nouvelles Littéraires, “c’est d’abord un roman protestataire, un hymne à la vieille Camargue, à ses manades, à sa population libre, rude et mystérieuse : un poème-paysage. Et sa beauté est éclatante […] [quelques] réserves ne m’empêchent pas d’aimer De sel et de cendre pour ses âpres vertus” (Robert Kemp)
Nota Bene : Une deuxième parution est prévue vers mi-fin 2022. Le Vin d’orage (jamais réédité) suivi de La Salamandre (inédit, son adaptation par l’auteur).