
07 Oct S’arrêter un moment…
S’arrêter un moment…
La vie intérieure
Vendredi 7 et Samedi 8 octobre 2016
Médiathèque Intercommunale François Mitterrand Asse Bléone Verdon
7, rue du Colonel Payan
04000 Digne-les-Bains
www.mediatheque-digne.fr
Mérédith Le Dez et Jean-Yves Vallat
Cette manifestation littéraire, au gré de lecture de fragments contemplatifs, souhaite vivifier le regard – trop souvent laissé aux oubliettes par la trépidation de nos vies.
‘S’ARRÊTER UN MOMENT…’ expression de Proal qui désirait (à la suite de Conrad) “faire s’arrêter les hommes” et se présentait comme « un raconteur de simples histoires humaines pour faire rêver les hommes… le temps d’un soupir, d’un sourire, d’une larme ».
L’AAJP a depuis longtemps senti le caractère essentiel et profond de ce thème à l’encontre de la posture actuelle du monde d’agitation permanente.
‘S’arrêter un moment…’ ouvre ce chemin d’être à l’écoute attentive, voire attentionnée, de notre espace quotidien. Souhait d’aller vers une acuité de présence au monde, aux autres, à soi – avec Jean Proal mais aussi avec d’autres créateurs.

Mérédith Le Dez
Pour cette deuxième année nous avons choisi d’inviter Mérédith Le Dez et Jean-Yves Vallat.
Mérédith Le Dez pour ce qu’elle est attentive à la vie du ‘maintenant’ du ‘minuscule’, d’une vérité incarnée des êtres et de la nature… sa proximité – rapport au temps, aux êtres, rapport à la terre et écriture charnelle – avec l’œuvre de Jean Proal.
Jean-Yves Vallat sera notre et son invité pour cette rencontre. Les 3 auteurs tant romancier que poètes nous transmettent ces moments retenus de ‘la clameur du vent’ (Jean Proal), ‘la chanson de l’air tremblant’ (Mérédith Le Dez), et la ‘pliure du monde’ – tous tendus vers le silence.
Vendredi 7 octobre de 18h30-20h30
– Présentation de l’expression et du projet S’arrêter un moment…
– Constante qui est au cœur de la Poésie
– Lecture de textes par Yves Mugler
À la rencontre de Jean Proal et Mérédith Le Dez / “Une étrange fusion”
– Des paroles à l’écoute de la vie immédiate et profonde, choses et êtres “si différents et si proches” (Jean Proal)
– Lectures d’extraits autour de thèmes très présents dans les deux œuvres
Il y avait bien eu la tentation d’écrire au jour le jour l’été de Pologne, vite avortée. Elle n’a consigné alors de cette époque aucune ligne, de sorte que quelques années plus tard, à vouloir rassembler les souvenirs, elle se heurte au mur. Qu’il s’agisse de monsieur K., d’elle-même, du voyage, elle se trouve confrontée au désert, avec en elle la nervure fervente, si vive qui veut irriguer, renouer, raccommoder, tisser l’impossible récit – toute entreprise d’écriture, une fiction lacunaire, mais si au creux s’ouvrait la faille vivante, l’évidence, qu’importe où aboutir ? […]
Quelques lieux ont ce pouvoir de racine, qui s’insinuent en nous et nous gagnent d’abord par le corps, entrant dans nos yeux en même temps qu’ils grimpent dans nos veines, par le réseau souterrain des nerfs, des os, et nous voici réveillés soudain par une fulgurance dont nous sortons transis. Nous nous croyions jusqu’alors sans attache. Le lien résiste en dépit du temps, de l’espace ; résonne comme une corde pincée : de terre en terre, des concordances s’établissent ainsi en nous, que nous habitons bien plus que nos réelles résidences. Elles deviennent principales.
Mérédith Le Dez, Polska, juillet 2010, ed. Folle avoine, p 15-16 et 18
Mérédith Le Dez, proalienne
Je vois dans le miroir
cet autre que moi
tout aussi étonné
par l’âge énigmatique
venu en somme
brouiller la piste
ce corps cavalier
avec l’intérieur de sa tête
toujours trop
en retard ou en avance.extrait de Cavalier seul, décembre 2016, éditions Mazette
Le corps perdu, de Mérédith Le Dez (lu par Yves Mugler)
Chanson de l’air tremblant, de Mérédith Le Dez
Noirétable, de Mérédith Le Dez
¶ Suivi d’un court entretien & échanges avec le public

Yves Mugler, Anne-Marie Vidal, Mérédith Le Dez, Jean-Yves Vallat
Samedi 8 octobre de 10h30-12h30
À la rencontre de Jean Proal avec Mérédith Le Dez et Jean-Yves Vallat : “L’écriture telle une source ou une lumière ”
– Leur rapport “corporel” à l’écriture
– L’être “planté” en un lieu… et pourtant et l’un et l’autre refusent d’être lus et considérés comme écrivain de terroir ou régionalistes
– Lectures d’extraits et de divers textes et témoignages dont quelques-uns de la correspondance de Proal
Nous fûmes parmi les oiseaux
indiscrets mais paisibles.
De hauts murs nous fîmes des places
d’ombre où s’éloignèrent les arbres.L’été tenait la terre
dans les doigts bleus des îles
et dans le dérangement des bateaux
montaient les chemins gris
des arbresde solitude
de pierre
aux jours d’abris du vent
où s’arrêtaient les lézards immémoriaux.Jean-Yves Vallat, Cendres, 1995, éd. de l’Envol (extrait p. 30)
La poésie, héritage de l’inconnu – Jean-Yves Vallat
VI
Le chemin est prudent.
S’il s’égare, il fera toujours demi-tour.
VII
La terre, du bleu à l’ocre
parcourait le verger comme une eau descendue de multiples marches de pierre. Il aurait pu s’agir de fenêtres ouvertes sur la lumière – une facilité du temps où les roses anciennes savent fidèlement écrire leurs soies usées.
Cela pouvait être aussi la surface d’un matin que le ciel avait déposé dans l’enclos pour qu’il ne puisse s’échapper hors des murs, et trop vite périsse dans une venelle sans reflets.
VIII
Les ossements de l’automne
commenceront d’apparaître. Ils auront le temps de construire de vastes tumulus. D’où le vent éloignera les feuilles vers des corridors sans visiteurs, et la pluie multipliant les seuils glacés, portera son bruit jusque dans nos chambres. Il s’agira d’un tout, celui d’une table mise et usée qu’il faudra lentement desservir à l’heure où la terre ne sait plus que faire de son bois mort.
IX
Dans le jardin
les degrés s’établissent à la manière de couleurs détachées d’une toile sans chevalet. Le monde a le goût de l’air, avec la clarté des nuages de soleil d’où les semences seraient parvenues.
X
Écrire pour faire taire le bruit de soi, et essayer d’entendre la phrase de ce pourquoi nous sommes.
Jean-Yves Vallat, Vers le Silence, 2016, éd. Folle avoine (extraits p. 64-66)
Il n’y a plus de jours en poésie (10 ans avant), lu par Anne-Marie Vidal
[…]
Aujourd’hui, je vais peu sous ma lampe. Ni meilleur ni pire ne suis devenu.
Ai-je encore besoin des mots ? M’enrager à écrire, comme le moissonneur antique qui, tendu par la récolte, presse son outil, avant que le soir n’efface son visage et les ronces obstinées ?
En ai-je encore besoin ? Puisque mon pays est de cent villages et mille chemins ma blessure, le cours supérieur de la mort tirant sans cesse sur sa chaîne alliée.
Jean-Yves Vallat, Vers le Silence, 2016, éd. Folle avoine (extraits p13-15)
Il n’y a plus de jours en poésie (10 ans après), lu par Anne-Marie Vidal

Mérédith Le Dez, Jean-Yves Vallat
¶ Grand entretien et échanges avec le public
¶ Vente de livres par la librairie La Ruelle

Yves Mugler, Anne-Marie Vidal, Mérédith Le Dez, Jean-Yves Vallat
Intervenants
Présentation et accompagnement par Anne-Marie Vidal
Lectures interprétées par Mérédith Le Dez et Jean-Yves Vallat et Yves Mugler